J’arrache sa peau type gargouille grise putréfiée, encore et encore, puis m‘étouffe à trop vouloir la mâcher. Il murmure qu’il est mon seul salut. Il rampe, il danse, il vit et meurt, au fond de ma gorge. Il griffe, il mord et hurle, il se débat à m’en crever les tympans. Il n’est pas d’un naturel patient. Il suffoque à chaque croix, chaque virage. A chaque seconde il se consume, fond, se morfond, et revit. Un pathétique phoenix qui se gerbe à l‘infini.
Il Hurle qu’il est mon seul pardon.
Il pleure d’être sans issue, de s’être dissous dans les acides du temps et se traîne de fatigue, quand dans un dernier moment d’égarement, je deviens juge, juré et bourreau. Il régurgite :
« De toutes ces créatures merveilleuses dont je suis le Père, combien en ai-je avorté ? Combien en ai-je laissé à l'abandon parce qu'elles ne voulaient pas grandir ? Combien en ai-je mutilé par omission ?
Et de celles dont j'ai pourtant été le plus fier, combien en ai-je crucifié ? »
Il saigne son âme sur une feuille de papier. Je la déchire, c’est une pute.
L’Armageddon individuel en trois temps apogée déclin.
Destruction du cycle.
J’ai purgé ma haine en giflant l’immaculée, avec pour seules lames quelques pinceaux, quelques mots, quelques restes. Quelques bribes qui n’appartiennent qu’à ma mémoire. A l’inconscient. Le soleil se lève, je mue. J’abandonne mon carcan, je respire, et continue mon chemin.
Je rampe tel un vers, j’attends toujours mes ailes.
Je suis la vie éphémère, le rêve abscons, je suis un fantôme revenu à la vie pour mieux saigner à nouveau. L’absurde trinité. Le schéma destructeur. L’Armageddon individuel en trois temps apogée déclin. Rideau. Applaudissements pareils à des milliers d’éclats de solitude. Les battements d’un milliers de cœurs qui vous précipitent vers votre fin.
Je ne sais plus quoi graver sur ma stèle, sur mes membres et mon esprit. Je pourris sur place et m’extirpe au néant pour disparaître alors que chaque pas m’arrache ma conscience.
Elle reste sur place, souriante et résignée, tremblante et révoltée. Elle n’aura guère fait long feu. Au royaume de l’illusion, les faibles sont alignés sur le mur de l’égocentrisme et abattu sans autre forme de parodie de justice. Pas de dernière volonté, pas de cigarette du condamné, juste une violente mise à mort. Juste la vie, dans ce qu’elle a de plus abjecte. Dans ce qu'elle a de plus absurde.
« Je suis la vie éphémère, le rêve abscons, je suis un traître revenu à la vie pour mieux briser à nouveau. »
Rideau. Applaudissements. Épitaphe.
Destruction du cycle.
J’ai été chié par la vie au point qu’elle se meurt à me remâcher. Je suis une peau grisâtre-gargouille qui t’étouffe jusqu’à la lie. J’ai traversé les déserts et les tempêtes de l’insondable solitude de mes esprits. J’ai vécu sans honneur, et peux mourir sans gloire.
Triptyque, cycle, je ne suis ni existence ni trépas, je ne suis ni pardon ni salut, ni énigme, ni réponse. Triptyque, cycle, nausée et égarement. Ni rien, ni tout. Ni vraiment un monstre, ni vraiment un homme. Triptyque, cycle, je titube et chute. Je me suis fourvoyé. J’ai mutilé les réponses pour qu’elles me conviennent. Chiennes.
Triptyque, cycle, déclin et mort dans le silence du chaos de l’esprit.
Je ne suis plus un fantôme, ni une résurrection, je suis une naissance. Je sens, sur ma peau, l’odeur délicate des griffes acérées de la vie. Ris, ris ! Car ceci est mon sang…
Mon âme s’est enfin extirpée, elle est morte née. Des pardons, des adieux, des rires et des souvenirs. La sensation de ne se résumer qu’à des bribes fait de l’existence une toile à laquelle nous nous raccrochons tels des insectes. Je rampe tel un vers, je n’attends plus mes ailes. Je n’en ai plus besoin. Je préfère crever avec la vermine que vivre avec les anges, fut-ce ils divins comme nucléaires. Explosion. Apocalypse. Jugement dernier en mode télé achat.
Achète moi ton rêve, je te dirai qui tu es.
J’aime, me souviens, découvre et vis, quelque part, entre espoir et volonté, entre la corruption d‘un idéal et l‘absence de justice. Ni pardon, ni salut ? En fait, ni haine, ni regrets. Juste l’écho doux-amer de souvenirs qui se fanent trop tôt, et qui n’avaient pas suffisamment éclos. Juste l’écho d’une promesse, de paroles oubliées, d’une voix vide de sens, disant que tu ne m’oublierais jamais.
Explosion. Apocalypse. Jugement dernier. Ctrl alt suppr paria.
Destruction du cycle.
Et je sens sur ma peau, les griffes acérées de la vie. Et je sens dans ma chair, la douceur de la joie. Et j’apprivoise en mon sein, le complexe de liberté. Loin des entraves, je retrouve ma nature éphémère, renoue avec mon démon, et meurt une dernière fois, sous les ovations éthyliques d’un jamais, d’un peut être, d’une promesse à demi faite aux creux des aléas de l’existence.
Nous sommes la vie éphémère, le rêve abscons, nous sommes un fantôme revenu à la vie pour mieux muer à nouveau. Nous sommes l‘absurde trinité, un triptyque déifique. Une agonie en trois temps.
Je trace une autre forme, et fatigué de creuser des sillons triangulaires ovoïdes, je crache des lignes courbes, au fond de mon esprit. J’ai brisé mes chaînes. Aujourd’hui, elles sont mon auréole.
Je suis un saint. Je suis un traître. Je suis un fourbe. Je suis une vacuité de l'existence.
Ris, car ceci est mon âme.