Il est des matins, en particulier les vendredis, où lorsqu'on se rend au bureau, on espère qu'un évènement inhabituel va bouleverser la journée de manière à vous permettre de rester chez vous histoire de prolonger le week end. Il est des jours comme ça où l'on espère, et où rien ne se passe, mais ce ne fut pas le cas aujourd'hui. En arrivant en retard de quelques minutes, je m'aperçu que les volets des fenêtres du bureau donnant sur la rue étaient encore fermés. En entrant, je découvre les bureaux sans dessus dessous, les piles de dossiers soigneusement rangés quant à elle en pagaille sur le sol, et deux de mes collègues stupéfaits par ce même spectacle. Une vitre cassée du côté jardin ne laisse plus aucun doute : Nos bureaux ont été cambriolé durant la nuit.
Bien évidemment, en amateur, le ou les vandales n'avaient pas le matériel nécessaire pour forcer le coffre fort de la gérante, heureusement. Tout au plus, ils n'ont piqué que peine quarante euros dans le tiroir du comptable. Après un rapide examen et une prise éclaire de la déposition par la police, nous nous en retournons à nos occupations habituelles. Il est évident que les investigations de la bleusaille n'aboutiront à rien. Quand on voit que pour découvrir des barbituriques dans le ventre de Chantal Sébire il faut une semaine alors que dans la série « Les Experts », un test, une autopsie et une arrestation prennent 50 minutes page publicitaire incluse, on ne peut se résoudre à en attendre beaucoup de la flicaille française. D'un autre côté, ils se la pètent beaucoup ces experts. Quand on a affaire a des gens qui laissent traîner du sperme et des poils un peu partout et qui sont déjà fichés, il n'est pas si difficile de trouver qui a fait le coup.
J'en viens donc à la conclusion que le ou les voleurs de cette nuit portaient des préservatifs, sont minutieusement rasé et épilés, de sorte qu'ils ne laissent rien derrière eux, puisque évidemment, ils doivent avoir vu eux aussi ce genre de séries. D'un autre côté, dans une affaire de cambriolage, il n'est peut être pas nécessaire rechercher du sperme, mais qui sait quels monstres ont pénétré nos bureaux.
Ma théorie la voici, au regard des éléments qu'un novice comme moi peux repérer en se basant sur un visionnage massif de séries policières et de thrillers - prononcer "Frileur" comme dans les pubs - style grosses productions sanguinolentes et sordides.
A 22 heures 38 environ approximativement, deux individus entrent dans le jardin, tout deux de types masculins. L'un deux est évidemment très intelligent, grand et maigre et fantasme sur sa mère. Il est cannibale aussi. C'est avec un membre tranché volé dans une morgue qu'il brise une vitre de la porte fenêtre permettant d'entrer dans les lieux. Le fait de briser la vitre avec cet avant bras lui procure un sentiment de toute puissance, sentiment déboussolant que seul une sodomie pratiquée sur son comparse juste avant d'investir la place peut lui permettre de réfréner afin de mener son plan machiavélique à bien. Son associé, de taille moyenne et d'intelligence toute aussi médiocre se laisse prendre car étant enfant, son grand frère pratiquait lui aussi sur lui ce genre d'abus. Galvanisé chacun par ce transfert, l'individu dominé que nommerons « suspect B » entre le premier car l'individu dominant, le « suspect A » l'envoi faire du repérage tandis qu'il s'injecte une dose de cocaïne acheté à un dealer marocain du nom de Saïd. La drogue provient, à coup sûr, d'Afghanistan.
Une fois dans les bureaux, ils retournent tout, à la recherche non pas d'argent au début, mais d'encre de photocopieuse, dans le but de se l'injecter également. Ce qui explique notamment que la photocopieuse de la secrétaire était à en panne d'encre de couleur ce matin. Ou bien ils se sont fait des photocopies, allez savoir ce dont-ils sont capables. Durant leur fouille méthodique, ils jettent tous les dossiers à terre, et c'est à ce moment là que le bordel engrangé dans les locaux rappellent avec effroi au « suspect A » l'anarchie qui régnait chez lui lorsqu'il était enfant, quand son père ivre mort rentrait et frappait sa mère avant d'avoir des relations sexuelles non consenties avec cette dernière. Sans vouloir trop m'avancer, je pense qu'il s'est mis à pleurer avant d'engager des actes masturbatoires sur sa propre personne. Son subalterne trouve une bouteille de champagne dans le bureau de la gérante, la pose, mais l'a laissé là. Pourquoi ne pas l'avoir emmené ? C'est parce que le « suspect B », seul à savoir qu'il avait découvert une bouteille, n'est jamais ressorti du bureau, du moins, pas vivant, mais j'y reviendrai plus tard.
Ils découvrent, toujours en fouillant un peu à l'arrache, la caissette du comptable, rangée avec précaution dans un tiroir. Ils trouvent également la clef, rangée précautionneusement à côté de la caissette. Elle contient quarante euros plus quelques centimes, mais ce chiffre symbolique fait remonter à la surface un traumatisme chez notre dominé, le « suspect B », car c'est le nombre de point qui lui manquaient pour devenir fonctionnaire lors du passage de ses concours. Se retrouver ainsi nez à nez avec ses démons lui fait réaliser que sa vie est un échec, et qu'il lui ait donné une chance, là, tout de suite, de se rattraper, en allant se livrer à la police. Constatant qu'il perd le contrôle de l'esprit de son complice, le « suspect A » le rassure, tout en empoignant une agrafeuse avec laquelle il tue son complice. Il se servira par la suite d'un coupe-papier pour découper le cadavre en morceaux, morceaux qui seront ensuite emballés dans des sacs poubelles trouvés dans la réserve.
Le « suspect A », au comble du machiavélisme, sait que si l'on découvre du sang, il risque d'y avoir une enquête approfondie. Il nettoie alors les traces, sort du bureau pour mettre le cadavre dans une benne à ordure plus loin, repasse par les jardins pour retourner dans le bureau, s'aperçoit qu'il aurait pu revenir par la porte car il l'avait laissé ouverte, ressort par les jardins, fait le tour pour la refermer, et entre encore une fois, par les jardins, se rend compte de sa connerie, se fait un café et lave soigneusement la tasse pour ne pas laisser d'empreintes. Maniaque obsessionnel du ménage - à cause de sa mère -, il lavera la vaisselle que nous laissons quotidiennement avant de la salir à nouveau pour ne pas éveiller les soupçons et permettre qu'on établisse son profil.
Il repart enfin par le jardin et regagne les toits, et je suppose sans trop m'avancer qu'il agressa plusieurs personnes sur le chemin, dont une mère célibataire de 48 ans et six mois rentrant de soirée et prénommée Monique, et bien que la disparition d'un telle personne ne soit pas à déplorer cette nuit, je reste persuadé de l'exactitude du scénario.
Bien entendu, dans l'après midi, j'ai exposé ceci aux connards de la police scientifique de Marseille venus faire des relevés d'empreintes (et de sperme j'en suis sur, quoi qu'ils en disent), et ils m'ont traité de cinglé avant de se foutre de ma gueule. Bah, Scotland Yard se moquait bien de Sherlock Holmes, et pourtant, c'est lui qui avait toujours raison. Bizarrement, ils reprochent à mon infaillible scénario de reposer sur le seul et unique indice que j'ai trouvé, à savoir un cure-dent. Toujours est-il qu'en touchant ce cure-dent, j'eu des visions très précises :
Des cuisses de poulets, des hamburgers, des dirigeables enflammés, une armée de nazis, des bébés frappés à coup de marteau, un hibou mangeant une souris, Ingrid Bétancourt, une chaise dans une salle d'attente quand il n'y a personne dessus, un Homme-Ours-Porc et encore des nazis.
Si on interprète bien ces visions, on ne peut évidemment qu'en déduire que les événements se sont bien déroulés comme je les ai exposé. Si je déambulais en peignoir, en m'aidant d'une canne pour marcher après avoir passé six ans dans le coma, peut être m'aurait-on pris au sérieux.
Laissons courir ce sinistre individu plutôt que de faire confiance à mon flaire, je suis conscient que je leur fait de l'ombre avec mes capacités de déductions hors normes. Et puis de toute façon, je reste persuadé que grâce aux 40 euros dérobés, le suspect A s'est fait faire de faux papiers et s'est payé un billet d'avion pour le Pérou et vivre une vie de fugitif.
Toujours est-il que je constate que la justice n'a pas changé. On mettra un innocent en prison plutôt que d'écouter la voix de la raison. Cela dit avant, lorsqu'on exécutait un innocent, ça avait un effet bénéfique et apaisant sur la foule qui entrait en transe à la vue d'un cadavre relâchant doucement son sphincter après la pendaison.
Le monde est décidément trop mou, à toujours dire qu'on ne résout rien par la violence. Ca nous va bien de dire ça aux terroristes qui kidnappent des connes et font sauter des bombes, nous qui avons guillotiné des nobles, empoigné les armes pour combattre ce que nous jugions injuste et révoltant. Fut un temps, les défenseurs de ce qui fait notre mode de vie était, eux aussi, des terroristes. Quoi ? Comment ça, ça n'a rien à voir avec le reste ? Ha ouais, c'est pas faux. Toute façon je vous emmerde.
Une journée de plus en moins.
Tu devrais envoyer ton synopsis à Matt Stone et Trey Parker :)
Et tu devrais aussi devenir profiler.
Inspiré d'événements réels ?