Ce matin, une légère brise balayait les cadavres des rêves
de grandeur de toute une nation.
On pourrait commencer cet article par une
débilité du genre, mais mon rôle c'est pas de faire dans la dentelle.
La soirée d'hier fut exceptionnellement calme, comparée aux autres soirées
foot-bleu-bière et son cortège de coups de klaxons, si calme qu'on pouvait
sentir la déception et la tristesse des français, qui vont maintenant pouvoir
se concentrer à nouveau sur leur activité favorite, à savoir gueuler contre
tout.
Le français optimiste est une curiosité de la nature, une aberration même. Bon
c'est un con aussi mais ça on le savait déjà, toujours est il que depuis bien
des années à le voir pester contre tout ce qui bouge (ou ce qui ne bouge pas),
il est intéressant de se souvenir que la dernière fois qu'on touchait du bout
des doigts le bonheur de l'hystérie collective, c'était en 98, sauf que cette
fois nous y étions parvenus. Ca fait donc environ 8 ans que le pays est en
totale dépression.
J'imagine la déception, la rancœur, d'un peuple déçu, dont les sentiments
exhalés viennent aujourd'hui de retomber comme un soufflé. J'imagine cette
euphorie envolée, disparue, pour ne laisser place qu'au train-train quotidien
et son désespoir.
Et je ris quelque part, de voir que la cause de cette
hystérie générale et ce qui y a enfin mis un terme, c'est une seule et même
chose. Le foot.
Je ne fais pas un plaidoyer anti-foot (c'est pas mon genre de dénigrer), je
constate juste une évidence, c'est que contre quelques petites nuisances
sonores pour cause de victoire des bleus, nous assistions à une grande communion
des esprits (aussi bas et primaire soient ils), une véritable ferveur presque
religieuse (bon ça je sais pas si c'est un bon point), une nation en liesse,
solidaire.
Et quoi qu'en dise la dictature médiatique servant le petit déjeuner
au ministère de l'intérieur en matière d'insécurité, ceux qu'on désigne comme
le problème actuel de la France
comme on désignait le juif comme ennemi du troisième Reich, et bien eux aussi,
comme beaucoup, brandissaient le drapeau français.
Enfin bon voilà, c'est enfin terminé, on va pouvoir rebrancher nos cerveaux et
parler d'autre chose que de foot. On va pouvoir gueuler contre les mesures
gouvernementales (on peut d'ailleurs se demander ou était passé notre bon
Nicolas Sarkozy durant tout ce mondial), on va pouvoir manifester, bloquer des
facs (ha non suis-je bête, c'est les vacances, donc on gagne presque deux mois
de tranquillité).
Bon d'accord, il faut reconnaître que tout ça ne tombe pas dans la bonne
période, mais patience pour ceux qui comme moi, aime une France gueularde,
renfrognée et frustrée.
Ce n'est pas avec un mondial (surtout lorsqu'on perd)
et des vacances (gâchées par une défaite en finale), qu'on vient à bout de la
profonde nature populaire française.
On peut toujours rebrancher maintenant nos cerveaux et constater que
toute cette joie n'a pas réglé les problèmes qu'on avait avant ce mondial, et vu
que la défaite n'est pas pour faire perdurer l'euphorie, ce matin, pour énormément
de français, le réveil a sûrement été dur, j'irai même jusqu'à dire comparable
une grosse gueule de bois (un mois à picoler ça fait mal).
Donc si ce matin au boulot ou
partout ailleurs, vous croisez quelqu'un visiblement abattu, le regard vide et
l'œil vitreux, laissez lui du temps et faire son retour à la
réalité. Si tout se passe bien, l'individu devrait se remettre à gueuler dans la
semaine, et se concentrer sur des sujets vraiment important comme le tour de France
et les soldes d'été.
Bah, les français n'ont à s'en prendre qu'à eux-mêmes : on a tell'ment encouragé les bleus qu'ils ont gagné. Erreur d'appréciation relativement balourde si l'on considère qu'on était les blancs durant tout ce mondial...Bref, retournons à nos moutons : on a des polémiques à faire naître quant aux prochaines présidentielles. On y va, appelez les CRS, sortez vos mouchoirs, ça va cogner fort, la France est en grogne !