A huit heures moins dix, il allume sa télé pour ne pas rater les guignols de l'info, c'est un adepte du vrai journal de Karl Zéro ou du JT de tf1. Il est victime d'une obsession constante pour le paysage politique français ; « tous des fumiers ! » vous dira t il, quand il ne milite pas pour Chirac, Holland, Sarko ou autres. Qu'il soit de gauche ou de droite, ou par opposition, qu'il ne soit d'aucun bord, et ne bénéficiant pas encore du droit de vote en raison de son jeune âge, le djeun'z engagé est une créature on ne peut plus pittoresque du monde politico-culturel de la France d'en bas. Pourquoi ? parce qu'avant tout, les crétins d'aujourd'hui sont les électeurs de demain.
Il est important de noter que l'animal se divise en deux catégories (voir trois mais la troisième ne nous intéresse pas). A l'instar du débat religieux, il y a ceux qui croient, ceux qui ne croient pas et ceux qui s'en foutent.
Avant même son entrée en sixième, le djeun'z engagé avait déjà sa carte de militant pour un quelconque parti politique ou refusait de voter lors des élections des délégués de classe suivant les cas; et tout comme son papa, sa conviction politique est bien souvent dictée par son origine sociale et son compte en banque plus que par une véritable réflexion.
Son affiliation est motivée avant tout par un long et subtil lavage de cerveau à grands coups de stéréotypes dans la tronche (finalement on devrait se remettre à battre les enfants, ca avait le mérite de les faire réfléchir avant de dire des conneries)
Son attention est certes limitée, étant donné qu'il préfère se fixer sur des petites phrases sorties du contexte pour débusquer la brebis galeuse et se faire son opinion plutôt que de s'attarder à écouter les débats à l'assemblée nationale et se forger une véritable opinion (évidemment ca préfère jouer à la playstation le mercredi).
Selon sa grande expérience, il nous sort que le pays est géré par des incompétents préférant le pouvoir et le fric à la politique elle même ; sauf bien entendu son candidat fétiche, qui lui au moins, est intègre.
C'est toujours avec un certain étonnement que j'entends ses longues dissertations sur la crise du chômage, lui qui n'a jamais fait la queue à l'ANPE et qui use encore ses fonds de caleçons sur les chaises du lycée.
Suivant un certain effet de mode et lobotomisé par les médias sans vraiment réfléchir au peu qu'il ingurgite, son opinion est aussi changeante que son intelligence est faible; il voit en général en l'autre un mouton qui ne comprend rien, sans se rendre compte qu'il se trouve juste dans l'enclos à côté, boudant l'herbe que mange son voisin pour préférer la sienne.
Par peur de se faire manipuler, il simplifie le monde politique : la gauche c'est pour les ouvriers, la droite c'est pour les patrons et les bourges, le centre personne sait ce que c'est et tout le monde s'en branle, et les extrêmes, c'est pour les salauds qu'aiment pas les arabes. (à noter que l'extrême gauche bénéficie d'une meilleure image…d'un côté on est loin de Staline et plus proche du facteur, la virulence d'un mollusque et le poids d'un timbre poste dans la balance politique en prime.)
Parfois victime de paranoïa, le djeun'z engagé (enfin désengagé puisqu'à partir de cet instant c'est uniquement lui qui nous intéresse) va jusqu'à mépriser le droit de vote, qu'il puisse en jouir ou non, histoire de s'imaginer qu'il n'est guère membre du troupeau.
Pour rien au monde il n'irait glisser un bulletin dans l'urne, mais par contre il ne cessera de faire entendre sa voix lors d'un défilé gigantesque parce que ce comportement anti-patrie permet à de dangereux personnages d'arriver au second tour des élections présidentielles (si vous voyez ce que je veux dire)
Il étonnera par ce paradoxe à se désintéresser en apparence de la politique pour mieux en disserter et rallier d'autres rebel'z de la life 666 yeah, déjà convertis à l'antipoliticisme primaire, histoire de ne pas faire mentir le vieil adage qui dit que ceux qui en font le moins la ramènent le plus…ce qui quelque part est bien dommage, car non content de ne pas se bouger le cul pour simplement se rendre aux urnes, il faut en plus qu'il nous casse les couilles.
Bref ca ne vole pas haut, dans un cas comme dans l'autre, les véritables interprètes du monde politique étant finalement aussi rare qu'une once d'intégrité chez un vendeur de voitures.
A la rigueur, je préfère encore ceux qui s'en foutent royalement, qui n'en parlent pas et qui feront mine de garder leurs opinions politiques pour eux afin d'éviter le sujet et les débats houleux sans grand intérêt, ou ceux qui ont une véritable opinion mais la garderont pour eux (après tout ca arrive vite d'être tondu en cas de changement de régime, dénoncé par un voisin qu'on croyait être du même bord), car ils ont au moins un certain mérite : celui de ne pas nous les briser avec leur rhétorique partisane usée et stéréotypée d'une part, et d'autre part, celui de ne pas passer pour des cons. Au pire seul le doute subsiste.
Satyricon mon ami, ce modeste post' est spécialement dédié à ton illustre personne. Je sais que tu l'attendais, et que ce genre de personnage t'insupporte au plus haut point.