Quand l’inconnu entra dans le bar, un profond silence, quasi religieux semblait dominer la pièce. Au milieu des effluves de tabac, d’alcool et de sueur, l’intriguant petit personnage avançait, déterminé ; il prit un tabouret au coin du bar, s’installa et commanda une bière pression.
Il regarda l’homme assit à sa gauche ; longuement, des pieds à la tête…il but une rasade de bière, avant d’engager la conversation.
« Vous n’êtes pas du coin vous
- Ca se voit tant que ça ?
- vous savez ici c’est un bar de quartier, on connaît pratiquement tout les gens…
- je pourrais très bien venir d’un autre quartier
- les types des autres quartier ne viennent pas ici.
- Pourquoi ça ?
- est ce que j’en sais quelque chose ?
- vous êtes du coin vous ?
- j’ viens de vous dire qu’ici y à que des gens du quartier
- donc vous êtes du coin, dit il avec un sourire.
- c’est ce qu’à juste titre vous auriez du penser mais ce n’est pas le cas, je viens d’arriver. »
L'homme assit au bar était pour le moins déconcerté par le discours du petit inconnu, pour détendre l'atmosphère, car son interlocuteur n'était pas dès plus sympathique de prime abord, il tenta une approche plutôt maladroite, bardé de son plus beau sourire :
- Vous êtes un original
- Vous m’insultez; rétorqua le petit homme
- Je ne vois pas en quoi...l'homme du bar était dérouté par cette réponse inattendue
- Vous me parlez depuis à peine cinq minute et déjà vous me traitez d’original ; dans une heure vous me traiterez peut être de cinglé…
- Mais je ne vois pas en quoi vous dire que vous êtes un original est…insistait il,
- Parce que c’est dit d’une manière qui ne me plait pas, monsieur.
- Très bien, je suis désolé ; je vois que votre verre et vide, pour me faire pardonner l’affront je vous offre un verre
- Si ça peut vous faire plaisir. »
Un profond silence s’ensuivit, et lorsque le patron lança « let there b e rock » l’atmosphère semblait plus détendue.
« Ce que je me demande, c’est si vous venez d’arriver, comment savez vous qu’il n’y a que des habitués du coin ici …
- C’est comme ça dans tous les bars ; et regardez les cinq minutes, vous comprendrez qu’ils se connaissent tous.
- Vous venez d’où ? l'homme du bar tenta encore une fois une approche banale afin d'en savoir plus sur l'inconnu,
- Du même endroit que tout le monde, je pensais que tout le monde savait comment on venait au monde…
- Ne jouez pas sur les mots...
- et en plus vous me donnez des ordres.
- Vous êtes tatillon
- C’est mieux que d’être stupide.
- La c’est vous qui m’insultez, l'homme du bar reprit une certaine confiance, éphèmère..
- Je généralisais, les gens ramène tout à eux, si vous vous sentez stupide je n’y peux rien. Et si l’offense est trop grande je vous paierai un verre, le vôtre touchant à sa fin.
- Vous n’avez toujours pas répondu, d’où venez vous ? L’homme du bar tentait de contrôler la discussion, comme s'il éprouvait un danger à laisser l'inconnu dominer la situation.
- Je n’ai peut être pas envi de répondre…par contre vous je sais d’où vous venez…
- Sérieusement ? fit l'homme du bar, étonné.
- Avec un accent pareil vous ne pouvez être que lorrain ; et même si vous tentez de le dissimuler, consciemment ou non, on retrouve certaines intonations propres aux petits bleds minables qui bordent les quelques agglomérations importantes de cette région. Vous êtes lorrain ça crève les yeux.»
L'inconnu, tout comme le lorrain, but une rasade de bière. Puis le lorrain ajouta
« En effet je viens de lorraine ; enfin je n’y retourne plus mais je viens de la. Je ne pensais pas trouver quelqu’un ici qui soit capable de reconnaître cet accent.
- Je n’ai aucun mérite j’en suis originaire aussi.
- Vraiment ? Où avez-vous grandit?
- Un peu partout jusqu’à mes dix neuf ans où je n’ai plus grandit d’un pouce…
- Vous recommencez, dit il en soupirant.
- Vous êtes perspicaces mon ami lorrain ; plus sérieusement je suis de la région Nancéenne, j’ai habité un peu tous les patelins alentour, Dombasle pendant un temps, si ça vous dit quelque chose…
- Bien sur, j’étais de Rosières, vous étiez peut être au collège avec moi…
- L’Embannie ?
- Oui ; c’est dingue, je voyage un peu et je trouve quelqu’un qui étais lui aussi dans cet établissement et qui vient de la même région.
- Les petits mystères de la vie. Vous avez quel âge ?
- … ans, répondit le lorrain.
- Alors nous étions au collège ensemble.
- Peut être que votre nom me rappellera quelque chose…
- je m’appel ………
- Non votre nom ne me dit rien.
- Moi je me souviens de vous. Je vous ai reconnu tout de suite.
- Pardon ?
- Oui je vous assure ; dès que je suis entré je ne me suis pas assis ici par hasard, mais je n’étais pas sur. Vous etes bien …… n’est ce pas ?
- En effet c’est moi-même. C’est incroyable tout ceci.
- Non c’est d’une banalité effarante. »
L’inconnu commanda alors deux autres verres, avant d’entamer à nouveau la discussion.
« Je ne me souviens pas de grand monde, j’ai préféré me faire oublier ; je ne sais pas si vous êtes au courant, mais beaucoup de nos conscrits disparaissent ou meurent dans des circonstances étranges…
- Oui je suis malheureusement au courant, c’est pour cette raison que j’ai quitté la lorraine, je voyage beaucoup en espérant que ça ne me tombera pas dessus.
- Bah ne parlons pas de choses si macabres ; après tout, nous sommes loin et hors de danger non ?
- Je l’espère… le lorrain, en proie au doute, tournait son verre du bout des doigts.
- Gégé !
- Le pion ?
- Oui, je viens de me souvenir de son surnom ; qu’est ce qu’il était con ce type.
- Je ne sais même plus pourquoi on l’appelait Gégé…
- A cause de ses initiales, et parce que pour nous ce surnom avait une connotation homosexuelle ; et parce qu’un élève faisait circuler des caricatures criantes de ressemblance avec ce cher surveillant et l’avait baptisé « Gégé »
- Exact ! Vous avez une mémoire étonnante. Maintenant que vous le dites ça me revient ; le même élève avait fait circuler des caricatures du directeur aussi non ? Le lorrain s'enthousiasmait de se remémorer ces souvenirs d'un autre âge.
- Oui une espèce de parodie de super héro avec un jeu de mot minable typique d’adolescent. Je crois me souvenir que le nom du directeur était Duclasson ; évidemment ce n’était pas dur de rire avec si peu, surtout après l’avoir mué en «Super Ducalecon » et l’avoir affublé d’un sous vêtement féminin en guise de costume…Je me demande ce qu’il est devenu d’ailleurs…
- Le directeur ?
- Non, le camarade qui faisait ces dessins ; j’avais gardé contact avec pas mal de monde, mais lui semble n’avoir gardé contact avec personne…
-En même temps à sa place j’aurais fait de même ; il n’était pas très populaire…
- C’est le moins qu’on puisse dire, le plus juste serait de dire qu’il était martyrisé.
- C’est la dure loi de l’école, il y à toujours un bouc émissaire…le lorrain s'en cachait, mais il n'aimait guère la tournure que venait de prendre leur discussion
- Oui, mais on s’en prend rarement au plus fort et au plus entouré ; on préfère s’en prendre à un gamin solitaire, pauvre.
- Et sale, mon dieu qu’est ce qu’il était sale, tout autant que son père alcoolique.
- c’est certain...
- Je me souviens bien de lui, c’était un caractériel, combien de fois on le faisait sortir de ses gonds, c’était trop facile.
- Oui c’était tellement facile, en même temps on vous aurez insulté et malmené tout les jours vous aussi vous auriez eu du mal à vous contrôler.
- Comme si c’était de notre faute, nous étions des gosses.
- Est-ce une excuse pour autant ?
- Ho il n’en est pas mort…le lorrain comprit alors qu'il avait trop parlé. Il ne voulait pas en parler.
- Ca on en sait rien, ce dont on est sur c’est que sa jeunesse à du être un enfer…
- Chacun sa merde !
- Belle conception, mais ça n’enlève aucun tort.
- De toute façon c’est loin derrière nous. Parlons d'autres choses.
- Peut être mais lui…il y pense peut être encore…
- peu importe. Fit il sèchement, parlons d'autres choses !
- Si ma mémoire est bonne, il avait juré de se venger.
- Ou il à peut être mit fin à ses jours, ou encore... l’auteur des disparitions de nos conscrit, c’est peut être lui ! Dans tout les cas je m’en fiche ! Le lorrain semblait être agacé par son étrange interlocuteur.
- Je crois que j’étais en cinquantième position sur sa liste noire.
- Il avait... une liste noire ?
- Oui, une sacré liste...
- Je...je suis dessus moi ?
- Vous étiez tente-huitème…combien de nos conscrit ont disparus ou bien sont morts ?
- Trente sept…le lorrain était maintenant plus livide que jamais lorsqu'il répondit
- Vous étiez au courant n’est ce pas ? Pour la liste…
- Oui mais avec les événements actuels, je préfère ne pas y penser…
- Surtout vu votre position. Reprenons des bières, j’ai soif.
- C’est moi qui paie. Le lorrain payait d'une main tremblante
- Trop aimable.
- Vous pensez qu’il pourrait être mêlé à tout ceci ?
- Pourquoi pas ?
- C’est effrayant.
- C’est ça que vous fuyez n’est ce pas ? Indirectement c’est lui que vous fuyez.
- Peut être. Non...enfin...je ne pense pas, ce sont tous ces ...enfin pas lui mais...
- tout ceux qu’il a croisé lui ont gâché l’existence, il est naturel de vouloir échappé à son juge, juré et bourreau. Aujourd’hui c’est lui qui gâche nos existences.
- Pourrait on changé de sujet ? Dit nerveusement le lorrain
- Non ce sujet est parfait. Il faut que vous compreniez au lieu d’en avoir peur.
- Et vous êtes sensé me le faire comprendre? Et que voulez vous donc me faire comprendre?
- Vu ma position sur la liste, j’ai une longueur d’avance, pas vous. Et je dois vous aidez à laver votre âme de la culpabilité, je dois vous préparer à la venue de ....
- C’est ridicule tout ça, il y a une probabilité infime pour qu’il soit effectivement le coupable.
- Vous ne regrettez pas ?
- regretter quoi ?
- D’avoir gâché sa vie ?
- ...Non...je n'ai rien fait...le lorrain marqua un bref temps d'arrêt, l'inconnu également.
- Comment voulez vous qu’il soit désolé de gâcher la votre ?
- Il ne me la gâche pas…je ne fuis rien ! Je ne regrette rien ! Et puis vous m’ennuyez avec vos histoires de bonnes femmes ! Je m’en vais ! Le lorrain se leva d'un bon, fixant son compagnon comme si il voyait la mort en face.
- Très bien, alors adieu, et puisse Dieu avoir pitié de votre âme quand vous vous trouverez en face de ……
- Il y a peu de chance que ça arrive, il ne me retrouvera jamais ; et puis vous êtes plutôt cinglé, comment pouvez penser ce que vous dites ; vous aussi vous y passerai.
- Vous voyez je vous l’avez dit qu’au bout d’une heure vous me traiteriez de cinglé…vous êtes prévisible, et si ….. est aussi déductif que moi, il doit prévoir le moindre de vos mouvements.
- Vous êtes effectivement cinglé, maintenant je prend congé ; adieu »
Le lorrain paya le patron du bar, prit sa veste et se dirigea vers la sortie
Il quitta le bar, suivit quelques minutes après par l’inconnu.
Le lendemain, sur le parking, dix mètres en face du bar, fut retrouvé le corps de Aurélien Simon, poignardé à plusieurs reprises ; son corps était étendu à côté de sa voiture…sur sa poitrine était épinglé un petit bout de feuille de papier déchiré avec son nom inscrit dessus, des annotations tels que des adresses, des téléphones…et devant son nom, on pouvait lire « numéro 38 »…
En plus de bien dessiner, il ecrit des trucs interessant le bogoss... Finalement c'est pour ca que t'enerves les gens, t'es TROP bien, ils sont tous jalous de tes diverses talents.
M'enfin, j'ai bien aimé cette petite "nouvelle?" et ça m'a meme fait pensé a certains ecrivains que je lis regulierement...
Po mal, po mal...