Griffonner quelques feuilles, les saigner de quelques mots, quelques images, spectres incomplets d'une époque révolue. Tracer quelques courbes, quelques lignes, et tout détruire d'un revers de l'esprit, d'un éclat de rêve, et recommencer encore, et encore, et encore, jusqu'à perdre pied et s'enivrer, pour un temps, des chimères qu'on trouve dans la destruction non pas de soi, mais de l'autre, d'un tout, d'une envie, d'une vague idée anarchique dans un absurde chaos. Tout effacer, d'un travers de l'esprit, d'une impureté qui se meurt et s'oublie.
Tracer une courbe écarlate et brûler le reste, jongler avec la réalité et ce qu'on voudrait qu'elle soit, au milieu des taches et des cendres, des gribouillages chétifs, des brouillons d'essais, des copies d'incertitudes, et finalement, creuser plus profond dans une peau grisâtre comme on creuse sa propre tombe. Creuser sa déchéance dans une page blanche ternie par les échecs et la peur, ternie par une image déplaisante de ce que nous sommes.
Renaître trois fois et réaliser qu'on tourne en rond dans un esprit fragmenté.
S'éteindre, et ne plus penser...
Faire carnage.
Quand l'instant suspendu se transforme en souvenir, l'alpha et l'omega ont le goût de ses lèvres, alors qu'une brise légère emporte au loin son odeur, la disperse, au coeur d'un dédale d'improbabilité que je contemple avec désir. Un éclat de rire dans ses yeux sombres, une caresse, sa chaleur. Une envie dévorante. Parce que si rien ne sera jamais comme l'idée que l'on s'invente de l'avenir, il n'existe rien de plus certain que la beauté d'un instant fugace et le souvenir que l'on en garde. Un instant, qui défie le temps lui même.