Il y’a peu, et c’est la tête basse que je l’avoue : J’ai regardé M6. Oui, la chaîne de télé. Mais comme quoi le vieil adage se vérifie (
A toute choses malheur est bon ou une connerie dans le genre), avoir supporté cette bouse visuelle fut un moindre mal, puisqu’elle m’a permis de découvrir qu’il existe encore en ce monde quelques hilarantes curiosités. Le pire c’est que ça fait partie de l’union européenne, et qu’on ne m’avait pas prévenu ! Je parle de cette contrée étrange qu’est la Bulgarie.
Non sérieusement, ami lecteur, tu savais que ça existait ce truc, la « Bulgarie »? Parce que visiblement, c’est la destination à la mode en matière de tourisme pour le français miné par la crise qui rêve encore de luxe à prix discount. Et faut voir le luxe ‘tention. Le quatre étoile la bas ça vaut un deux étoiles ici, mais au final le deux étoiles ici tu le payes moins cher. Cherche l’erreur. Par contre ce qu’il y’a de bien, c’est que dans les hôtels bulgares, on laisse pas rentrer n’importe qui, à commencer par…les bulgares eux mêmes. D’un autre côté c’est bien pour le touriste français en quête de dépaysement, parce qu’entendre des simili-roumains pleurer misère, il connaît, le touriste. Faudrait pas que les vacances deviennent un prétexte à découvrir les autres cultures bordel de merde ! Donc il cherche avant tout à rester entre gens d’un certain standing, qui déboursent pas cher pour une merde, en se consolant par voie d’auto persuasion comme quoi c’est pas si mal, parce qu’il faut quand même reconnaître que c’est de la bouse son séjour (
Mais faut pas lui dire, sinon il aura l‘impression de se faire enculer). Et faut voir comment c’est construit tiens. Y’avait plus d’isolation phonique dans le HLM ou j’ai passé une partie de mon adolescence, c’est dire.
Je reviens quand même vite fait sur le mini apartheid pratiqué en ces oasis de luxe à quatre étoiles communistes (
et on l’aura appris, entre autres merveilleuses velléités dont on a largement fait la propagande sur ce blog, l’apartheid, c’est BIEN),
parce que c’est au moment précis où je vis ces pauvres brebis pathétiques tenter de se muer en vilains crabes -
comprenez par là, lorsque je les vis se baigner - que le gentil « journaliste » -
Un type de chez M6 qu'a trouvé une carte de presse dans une poubelle - explique en voix off qu’il n’existe qu’une seule station d’épuration en Bulgarie, qu’elle date des années soixante, et donc que le contenu des intestins de nos vacanciers flotte joyeusement dans la mer parce que tous les hôtels déversent leurs eaux usées dans la mer toute proche. D’un point de vue purement français, donc fier et chauvin, mieux vaut, pour un pingre endimanché, se baigner avec de familiers étrons plutôt que mêler sa fange avec celle de quelques peuplades primitives. Encore une fois, on ignore la noble culture bulgare.
Sinon, c’est heureusement à ce moment que j’ai décroché, l’absurde et l’abjecte de la situation déclenchant en mon esprit tordu les scénarios les plus loufoques, mais aussi et surtout grâce à l’omniprésence durant le reste du reportage, de la question des besoins corporels élémentaires. J’ai définitivement associé la Bulgarie au soulagement rectale propre à toute espèce animale et ce qui en découle : L’étron. (
Autre sujet fétiche de ce blog, vous en conviendrez). Il suffit de voir un bulgare dans sa campagne et le mot est lancé « Bulgariaaaaaaaaaaaaaa ». Tel un hymne, tel un cri de guerre. Le bulgare est un étron piégé dans un pays de merde.
On enchaîne sur un ressortissant de l’Est qui loue des jets privés à prix cassé en France, et que je soupçonne d’être bulgare puisque la première chose qu’il fait une fois à bord de l’avion, c’est vous déplier le siège pour vous montrer où les concepteurs ont planqué la cuvette des chiottes. « Bulgariaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa ».
Vient ensuite un reportage sur de la plongée en Egypte, mais mon cerveau n’en peut plus, et même si l’on ne parle plus de la Bulgarie, il n’empêche que les plongeurs tous novices me font hurler de rire, parce que forcément, je n’ai plus qu’une chose en tête : Les voir collecter des étrons sub-aquatiques en hurlant « Bulgariaaaaaaaaaa ».
Le reportage est fini depuis deux heures, et moi je m’éclate encore de ma connerie. C’est du « Bulgariaaaaaaaaa » à toutes les sauces (
A noter qu’il faut le prononcer avec une caricature d’accent russe), au grand dam de
ma chère et tendre.
Bien sûr, n’importe quel esprit adulte, ou simplement normal, se serait lassé, et n’aurait pas poussé le vice jusqu’à le crier assis sur ses toilettes. C’est pourtant ce que je fis. Comme pour marquer ma différence, mon attachement, à ce pays à la con où je ne poserai jamais les pieds, à sa culture, enfin à l’idée que je m’en fais, c’est-à-dire celle d’un gros paysans qui brandit un étron au bout d’une fourchette en criant « Bulgariaaaaaaaaaaaaa ».
Une semaine ou presque après le reportage, je ne me suis pas lassé de ce cri de guerre. C’est pitoyable, je sais, mais autant je suis d’un cynisme désabusé, autant je me marre parfois pour rien, et c’est souvent de mes propres conneries. Et ce qui est dommage, c’est que ce petit récit ne donnera pas le centième de la joie pure qui me fut prodiguée à ce moment là. C’est là toute la magie et, paradoxalement, l’absolu fourberie des mots et de l’imaginaire partagé, qui ne sont que perversion travestie d’une réalité, ou pire, d'un instant passé. Jamais vous ne pourrez approcher cette joie intense que fut la mienne en éructant « Bulgariaaaaaaaaaaa » toute les cinq minutes, posé sur mon trône.
D’un côté, je vous plaindrais presque pour la peine, parce que finalement, vous qui n’êtes pas moi, vous devez bien vous faire chier dans votre vie, et d’un autre coté, j’aimerai que vous puissez voir le monde tel que je le perçois.
Cela dit, que ceci ne vous empêche pas de tenter l’expérience, même si elle ne repose pas sur le même symbolisme.