(Sous titré : j'aime pas les gens qu'aiment tout le monde)
Peace and love.
Qui de nos jours, se fait le porte parole des idéaux hippies ? Qui de nos jours véhicule encore ces beaux préceptes de tolérance d’une bande de fumeurs de joints aux cheveux longs et idées courtes sur leur avenir direct ? Qu’est devenu l’amour de la musique et la fête, le rejet des règles établies et du système qui nous opprime, du rejet de la souffrance et de la misère ?
Les années soixante et son cortège de mini vans Volkswagen aux couleurs psychédéliques de trip sous acide sont définitivement du passé.
Hein ? Comment ?
Ah oui…c’est vrai autant pour moi. Il reste un bon nombre de naïfs encore embourbés dans un délire « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ».
Le ska-man est de ceux là
De loin, ça ressemble à un skateur, ça à l’allure d’un skateur, la démarche est même similaire mais il n’en est rien. Sa musique est tout autre, son style est tout autre (c’est plus large), sa démarche nonchalante et ses locks dégueulasses autant que ses yeux mi-clos et rouges trahissent un caractère calme et un attrait particulier pour la marijuana; les mauvaises langues de mon acabit diront même qu’ils sont extraordinairement mous, comme un vieux chewing-gums mâchouillé pendant des heures…
Ce type d’individu se déplace souvent de la musique sur les oreilles, ou un instrument sur le dos : une gratte, parfois une sorte de tambour africain ou… un narguilé.
Généralement accompagné du même type de personnes, ces chiffonniers encolorés sont, lorsque le soleil est au rendez vous, affalé dans les parcs, un nuage à l’odeur suspecte marquant généralement l’emplacement (un peu comme les sioux) qu’ils ont choisi.
La nuit, on peut les apercevoir dans les patelins aux alentours des grandes villes, dans la forêt autour d’un grand feu (en total mépris des règles de sécurité du plan canicule), pour continuer à fumer, boire, jouer de la musique et si possible tirer son coup.
Le ska man est aussi friand de concerts, improvisés comme véritables festivals, où amateurs et professionnels se rencontrent pour le plus grand bonheur d’une génération pas méchante pour deux ronds, alcoolisé et soudée.
Tout le monde est la bienvenue, telle pourrait être l’impression que l’on peut avoir après les avoir côtoyés peu de temps, la réalité apparaît toute autre lorsque l’on passe un peu de temps avec eux.
La tolérance ? oui…à petites doses.
Car le ska man, bien que tolérant à l’excès au point qu’il en devient énervant à aimer tout le monde, ne pourra pas s’empêcher (suivant son taux d’alcoolémie) de tenter de vous rallier à sa cause.
Vantant les charmes du communisme (ou le critiquant parfois, preuve d'une réelle cohésion au sein du mouvement) au point qu’on souhaiterait (presque) lui payer un voyage au goulag, il n’aura de cesse, s’il voit en vous une personne potentiellement convertissable, de cracher sur le système et de disserter longuement sur le partage des richesses.
Juste pour rire, demandez lui de vous filer 20 euros…
Son engouement pour les plus démunis et sa verve contre notre gouvernement serait des plus admirable, si on faisait abstraction que comme beaucoup avant et après lui, le ska man se nourrit plus d’idéaux que d’acte. Profondément non violent, (jsuis sur que ca vous donne des idées :D) la révolution pour lui, c’est plus un fantasme qu’une alternative.
Mais quand bien même, pourquoi s’acharne t il à convertir son prochain ?
Parce que comme beaucoup de personne qui affirme le contraire : votre différence le dérange.
Ce qui apparaît comme tolérance devient rapidement sectarisation. " On aime tout le monde surtout si vous êtes comme nous"
Mais peut on reprocher au Ska man de préférer les gens à son image, c'est à dire mous, colorés et mal fringués, avec des idées stupides plein la tête, plutôt que des gens qui risqueraient de remettre toutes ces croyances utopistes en cause.
C’est aussi la raison pour laquelle on peut supposer que le ska man est sourd ; plus intéressé par sa dissertation que par ce que vous pourriez lui apporter.
C’est avec une lueur proche de celle de Staline lorsqu’il faisait liquider ses opposants, quand à l’apogée de son discours intitulé « être comme nous tu dois », il vous fixera droit dans les yeux (s’il tient encore debout) et soit gerbera à côté de vous, soit tombera ivre mort (la chute du communisme) ou bien, la larme à l’œil, il montrera ses congénères dansant au son des guitares clean mal accordées et des trompettes et vous dira : "faut montrer au gouvernement qui on est ! faut se rassembler et écouter du ska. "
Mouais, j’suis pas convaincu…
Si votre réaction consiste à sourire nerveusement tout en vous retenant de lui envoyer votre poing dans la gueule parce qu'ils vous énerve, et lui expliquer GENTIMENT que ce qu’il refuse de comprendre depuis une heure, c’est que vous êtes la par le plus grand des hasards, traîné de force par quelques amis, et que son petit monologue vous laisse légèrement de marbre, et que surtout, vous êtes plus un adepte du stand buvette que du ska…vous sentirez alors comme un froid entre vous et l’interlocuteur.
Le ska-man possède également un solide self-control : tenir un speech de plus d’une heure pour tenter de rallier un quidam à sa cause (si cause valable il y avait) alors qu’à chaque occasion, le quidam en question vous glisse des réflexions cinglantes, c’est digne d’un témoin de jéhova.
Si par ailleurs, vous avez une légère tendance à vous foutre ouvertement de la gueule de tout le monde, vous passerez alors pour le pire des enculés « naaaaaaaaaaaaaaan mais t’es quiiiiiiihen pour jugeeeeeeeeeer les geeeeeeeeeens comme caaaaaaaaaaa »
Et comment passer à côté de son sens de l’humour (très limité comme vous l’aurez compris) ! La préférence du ska man : les jeu de mots fait avec comme base « ska ». Tout y passe : Skalibre, skanabis, skatastrophe, skalpel, skaricature…
Le plus merveilleux reste quand même : skabruti… comme si ces deux mots étaient fait pour être associés.
Le ska-man, à son entrée dans le monde adulte/ métro boulot dodo, oubliera très vite ses beaux idéaux de tolérance et de partage pour se (ré)conforter dans un nouveau moule, et comble de tout, dans ce moule qu’il avait toujours décrié avant de dire qu’il n’y rentrerait jamais. Les hippies et autres soixante-huitars sauront que je dis vrai...
Lui aussi portera un costume, aura une coupe ringarde (d’un côté c’est toujours mieux que des cheveux avec pleins de nœuds et pas lavés) et lui aussi se conformera au système pour mieux profiter des autres, suivant son statu social.
Un pincement au cœur marquera définitivement son détachement envers l’ex ska-man qu’il était autrefois, lorsqu’un sosie de Bob Marley lui demandera quelques piécettes, et qu’il lui répondra « t’as qu’à bosser feignasse » avant de lui cracher dessus.
Faut pas se leurrer, si tout les marginaux du lycée finissaient marginaux à l’âge adulte, c’est un clochard tout les demi-mètres que nous rencontrerions dans la rue.
Le fantasme de révolution et les beaux idéaux, c’est bien connu, ne dépassent généralement pas le cap de la vingtaine d’années…